Violette Viannay – Présidente de l’Association des Personnes de Petite Taille
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Pour notre Positive Interview, nous avons eu le plaisir d’accueillir Violette Viannay, Présidente de l’Association des Personnes de Petite Taille (APPT).
Elle nous sensibilise sur le nanisme de manière générale et plus précisément sur le sujet des représentations qui en sont faites dans la communication et les médias.
« On ne peut pas dire que les personnes de petite taille ne soient pas représentées dans les médias. L’enjeu aujourd’hui, c’est de savoir comment elles sont représentées : est-ce qu’on est sur une forme d’assignation ou sur une simple représentation assez banale de la diversité ? On est obligé de constater et de le dire, aujourd’hui encore, les personnes de petite taille, elles sont sujettes à des représentations un peu stéréotypées. Dans le cadre de la publicité, on prendra une personne de petite taille pour faire référence, par exemple, à une échelle de prix assez réduite ». « Moi, j’aime bien parler de banalisation de la différence (…) et je pense que les médias, la publicité ont un réel rôle à jouer là-dessus ».
Une interview de 5 minutes riche d’enseignements pour tous et en particulier pour les communicants.
Quelle est la mission de l’APPT ?
Alors, l’Association des Personnes de Petite Taille a essentiellement 3 axes de travail. Elle vise d’abord à sensibiliser l’opinion publique, parce que le nanisme est une condition encore peu connue, pas toujours bien représentée, et donc l’association intervient à ce niveau-là pour sensibiliser tant le corps professoral, le secteur professionnel que le volet politique par le biais d’actions militantes. Le deuxième axe concerne plus le suivi, on va dire, médical. Le nanisme, c’est plusieurs causes et maladies rares, donc il y a plusieurs études cliniques qui sont en cours. L’association, elle a pour mission de suivre l’avancée des éventuels traitements thérapeutiques qui sont mis sur le marché, de sensibiliser ses adhérents aussi au parcours de soin, aux grandes étapes de leur parcours, et de travailler aussi de paire avec le corps médical pour faire du lien entre les personnes, on va dire, malades, si on peut parler d’un point de vue de santé, et le corps médical. Et, enfin, elle accompagne au quotidien ses adhérents d’un point de vue plus soutien administratif dans le cadre d’éventuelles démarches qui seraient de l’ordre de la reconnaissance qualité travailleur handicapé, comment on fait pour solliciter la MDPH de son département ou passer son permis de conduire, trouver une auto-école qui accepte de faire passer le permis à une personne atteinte de nanisme.
Un handicap visible est-il plus lourd à porter ?
Alors à chaud, comme ça, je dirai non, pas forcément. Parce que je pense qu’il y a des handicaps, comme vous dites invisibles, qui sont particulièrement lourds. Après, entre parenthèses, je ne suis pas nécessairement bien au clair ou je n’apprécie pas forcément vraiment cette différenciation qu’on fait entre handicaps visibles ou invisibles parce que le principe du handicap, c’est qu’on doit faire face à une difficulté, qu’elle soit visible de tous ou visible simplement de nous, à la fin le problème est le même : il s’agit d’un handicap. Ceci étant, parenthèse fermée, si j’oriente plus la réponse par rapport au nanisme : oui, c’est très difficile parce que c’est un handicap dont la différence est particulièrement marquée, elle est visible et elle est même visible au point qu’il y a des actes d’incivisme auxquels on fait assez régulièrement face, comme des photos prises à la volée par exemple. Ça, c’est quelque chose qui fait que, qui démontre que le handicap invisible, cumulé d’une méconnaissance, d’une assignation, d’une stigmatisation, peut être parfois très très lourd à porter. Et c’est là où, par ailleurs, les médias ont une énorme responsabilité.
Quelle représentation dans les médias ?
Alors on ne peut pas dire que les personnes de petite taille ne soient pas représentées dans les médias, ce serait une erreur. L’enjeu aujourd’hui, c’est de savoir comment elles sont représentées : est-ce qu’on est sur une forme d’assignation ? D’une classification ? Ou est-ce qu’on est sur une simple représentation assez banale de la diversité ? On est obligé de constater et de le dire, qu’aujourd’hui encore les personnes de petites tailles, elles sont sujettes à des représentations un peu stéréotypées. Dans le cadre de la publicité, on prendra une personne de petite taille pour faire référence, par exemple, à une échelle de prix assez réduite, pour mettre en lumière le phénomène. On sera assez à l’aise pour mettre le nanisme en visibilité, par exemple dans le cadre des Jeux Olympiques et paralympiques, et heureusement, effectivement, que cet événement participe à la sensibilisation et à une meilleure visibilité. Aujourd’hui, l’enjeu se situe à deux niveaux : il faut essayer de stopper cette assignation à des rôles bien spécifiques, qu’on puisse voir des personnes de petite taille dans des situations lambdas. Et, deuxièmement, il faut faire en sorte que ça soit assez équitable et généreux comme approche, c’est-à-dire que ça soit des choses positives et dans lesquelles tout le monde aussi peut facilement se représenter sans passer par le biais de “ah oui, c’est le nanisme donc c’est pour ça qu’il y a cette mise en avant”.
Comment améliorer la situation ?
Pour avoir une meilleure représentation, je pense que les communicants, ou les créatifs d’une manière générale, doivent accepter qu’ils n’ont pas forcément toute la connaissance et qu’il est juste qu’ils se posent des questions sur la manière de rendre visible cette différence. Les enjeux, il y en a plusieurs, il faut qu’on évite cette assignation et qu’on souligne les caractères assez primaires que, là, dans le cadre du nanisme, pendant plusieurs siècles, on a pu faire perdurer sur plusieurs champs. Ça va de : on évite d’être toujours dans le rôle de la personne qui fait rire, ou au contraire dans le rôle de méchant qui est maléfique, etc. On sort un petit peu de ces vieilles représentations et on se dit “la personne là, c’est tout le monde”, il faut qu’on banalise cette différence et il faut surtout que la personne qui voit ce spot publicitaire, elle puisse se retrouver dedans, et elle puisse se dire “ça pourrait être moi » et indépendamment de tous les caractères plus ou moins répulsifs qu’on peut avoir de certaines différences qui sont assez marquées et lourdes de poids historiquement.
Un positive word pour conclure ?
Moi, j’aime bien parler de banalisation de la différence et je pense que c’est une terminologie ou un concept qui parlera à plusieurs personnes de petite taille. L’idée, et je pense que les médias, la publicité, ont un réel rôle à jouer là-dessus, c’est de se dire que certes, le handicap, c’est problématique parce que ça peut avoir son lot de difficultés au quotidien, mais que ce n’est pas une malédiction en soi. En fait, les médias doivent pouvoir permettre à la population de se retrouver dans les personnes qui sont représentées sans se dire “ah non ça jamais, ça ne me concernera jamais, ça ne me concerne pas et je n’y suis pas sujet”. En fait, si, déjà, tout le monde y est sujet, tout le monde y est plus ou moins touché un jour ou l’autre, on parle des problématiques de vieillissement, ça rejoint assez les problématiques de handicap. Donc, les médias ont un rôle à jouer pour distancier le problème de la différence et surtout en faire quelque chose, un objet de bienveillance et surtout de commun et d’accessible à tous.